Comment faire face aux fortes chaleurs ? Quels effets sur le corps, quels moyens d’actions ?

La période estivale expose chaque année les travailleur.ses à des fortes chaleurs rendant le travail plus difficile. Avec le réchauffement climatique, les périodes de chaleur extrême devraient être de plus en plus nombreuses et de plus en plus longues.

Bien que le gouvernement actuel ait décidé de continuer dans l’inaction climatique, les travailleur.ses devront de plus en plus faire face à ces conditions extrêmes. Il est donc impératif de savoir se protéger et d’imposer un rapport de force pour faire face aux effets de ce réchauffement sur le travail.

La crise climatique a des conséquences très directes sur le travail et les conditions de celui-ci avec d’importants risques pour la santé sans pour autant que les travailleur.ses puissent mobiliser des moyens juridiques pour faire face à ces situations.

Alors que l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) estime qu’au-dessus de 30° pour une activité sédentaire et de 28° pour un travail physique, la chaleur constitue un risque, en France, la loi n’établit pas de température au-delà de laquelle un travailleur.se ne peut et ne doit occuper son poste.

Quels effets de la chaleur sur le corps ?

  • Un excès de fatigue ;
  • Des sueurs abondantes rendant le travail plus délicat ;
  • Des crampes ;
  • Une déshydratation ;
  • Des nausées, des maux de têtes, des vertiges, des pertes de consciences
  • Des coups de chaleur…

Comme l’indique l’INRS, les effets de la chaleur sur la santé sont plus élevés lorsque se surajoutent des facteurs aggravants comme la difficulté de la tâche. La chaleur augmente par ailleurs les risques d’accidents car elle induit une baisse de la vigilance et une augmentation des temps de réaction. La transpiration peut aussi rendre les mains glissantes ou venir gêner la vue.

Comment faire face aux fortes chaleurs au travail ?

Les employeur.ses ont l’obligation de garantir la sécurité de leurs employé.es : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (Article L4121-1 du Code du travail).

En amont, l’employeur a l’obligation d’identifier et évaluer les risques professionnels en fonction du poste de travail, de la tâche à accomplir, de l’organisation du travail et de l’aménagement des locaux (durée de la tâche, travail en extérieur, rotation du personnel, temps de pause, travaux physiques, climatisation et aération des locaux, accès à l’eau potable etc.). Il doit retranscrire ces risques dans le Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels (DUERP), dans la partie « les risques professionnels liés aux ambiances thermiques » (L4121-3 et R4121-1 et suivants du Code du travail). Le Comité Social et Economique (CSE) est consulté sur ce DUERP. Les résultats de l’évaluation doivent déboucher sur la définition d’actions de prévention des risques et de protection des salarié.es.

Combattre les fortes chaleurs : Quels aménagements de l’organisation du travail en période de fortes chaleurs ?

  • Utiliser des protections individuelles et porter des vêtements clairs et adaptés aux fortes chaleurs si possible
  • Exiger l’aménagement des horaires de travail sur les périodes les plus fraîches de la journée dans la mesure du possible – Privilégier le télétravail quand cela est possible et si cela permet d’éviter les fortes chaleurs
  • Limiter le temps d’exposition des salariés aux fortes chaleurs
  • Augmenter le nombre de pauses
  • Limiter le travail physique et les contraintes physiques, mécaniser une partie des tâches
  • Éviter le travail isolé
  • Prévoir des sources d’eau potable et fraîche à proximité des postes de travail (obligation de l’employeur, article R4225-2 du Code du travail)
  • Prendre en compte des périodes d’acclimatation particulières pour les nouveaux travailleur.ses (l’INRS conseille 7 jours pour les fortes chaleurs)
  • Ce qui, dans le cadre d’une organisation particulière du travail, peut limiter les effets délétères des fortes chaleurs.

Par ailleurs, des dispositions spécifiques prévues par le code du travail, s’appliquent aux salarié.es du bâtiment (mise à disposition d’au moins trois litres d’eau par jour et par personne, local pour protéger de la chaleur, à défaut de local, un aménagement des horaires doit être envisagé etc, voir articles R4534-142-1 et suivants du Code du travail).

Les postes de travail extérieurs, que l’activité relève ou non du secteur du bâtiment, doivent être aménagés de telle façon que les travailleur.euse.s soient protégé.es, dans la mesure du possible, contre les conditions atmosphériques, telles que les intempéries (zones d’ombre, abris, locaux climatisés… voir article R4225-1 du Code du travail, précisé par la circulaire DGT n°9 du 4 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre du plan national Canicule).

Au-delà des quelques obligations légales faites aux employeurs, les salarié.es, par le biais de leurs représentant.es (DS, CSE, CSSCT) ont tout intérêt à se mobiliser pour imposer et obtenir une modification des conditions de travail, des dispositifs de protection ou toutes les choses qui pourraient permettre de gérer ces conditions climatiques particulières.

Dans tous les cas, les fortes chaleurs doivent faire l’objet d’une adaptation de l’organisation et du rythme de travail pour la simple et bonne raison qu’elles peuvent avoir des conséquences dramatiques sur la santé des personnes.

Mobiliser le droit de retrait et le droit d’alerte ?

Lorsque rien n’est fait par l’employeur pour faire face aux fortes chaleurs ou lorsque celles-ci deviennent trop insupportables, tout.e salarié.e peut faire valoir son droit de retrait (y compris les plus précaires, CDD intérim, saisonnier.ères ou salarié.es de la sous-traitance).

« Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. […] Il peut se retirer d’une telle situation. […] L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection. » (Article L4131-1 du Code du travail).

Afin que le.la salarié.e ne reste pas seul.e face à l’exercice individuel de son droit de retrait, il est conseillé aux représentant.es du personnel, dès qu’un.e salarié.e exerce son droit de retrait, d’agir de manière collective en demandant la tenue d’une réunion extraordinaire du comité social et économique ou de la commission santé, sécurité et conditions de travail, ou encore le déclenchement d’une enquête etc.

Les membres du comité social et économique peuvent eux aussi user d’un droit d’alerte si ils.elles constatent une cause de danger grave et imminent (Article L4131-2 du Code du Travail). Ce droit d’alerte peut être un appui au déclenchement du droit de retrait des salarié.es. Soyez vigilants aux alertes canicule de Météo France, plus le niveau d’alerte est élevé, plus l’employeur est tenu de prendre des mesures pour protéger les salarié.es.

Le droit de retrait peut être donc mobilisable, sachant qu’il a déjà été utilisé pour des questions de température et de conditions de travail (CA Douai 20 avril 2012 N° 11/01756 : un salarié chargé de nettoyer des voitures dans un atelier dont la température tournait autour de 3 °C, la Cour d’appel a jugé ce retrait comme justifié).

Enfin, salarié.es comme représentant.es du personnel peuvent également saisir l’inspection du travail.

Pour autant et au vu des prévisions climatiques, il est nécessaire que cette question soit clairement tranchée et établie dans le Code du travail pour protéger les travailleur.euses d’aujourd’hui et de demain.

Aujourd’hui, seul un plan de gestion des vagues de chaleur est disponible en ligne sur le site du ministère de l’écologie.

Celui-ci limite l’action des pouvoir publics sur la question des effets de la chaleur à deux actions (11 et 12) permettant la création d’un guide à destination des entreprises concernant les adaptations possibles des bureaux de travail et le renforcement des contrôles de l’inspection du travail. Bien peu de choses face au réchauffement climatique qui nous promet des épisodes caniculaires de plus en plus importants.