Le harcèlement sexuel porte atteinte aux droits fondamentaux. C’est une violence fondée sur des rapports de domination et d’intimidation.

La loi du 6 août 2012 donne une définition à la fois plus précise et plus large du délit de harcèlement sexuel. Cette définition est déclinée à travers les différents textes qui régissent notre quotidien: Code Pénal, Code du Travail, ​loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

En outre, la loi aggrave les peines maximales encourues, réprime les discriminations commises à l’encontre des victimes, et renforce la prévention du harcèlement sexuel dans le monde professionnel.

1. Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui :

  • portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
  • créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Ex.: des réflexions sexistes au quotidien, des propos obscènes à répétition… peuvent être qualifiés de harcèlement sexuel.

2. Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, pour soi-même ou au profit d’une autre personne.

Ex.: un recruteur qui profiterait d’un entretien d’embauche pour exiger une relation sexuelle, à son profit ou pour quelqu’un d’autre, un agent immobilier qui se livrerait à ce type de chantage en échange d’un logement, un enseignant…

NB :

  • Les actes de harcèlement sont passibles de sanctions, qu’ils soient commis par un collègue, par un cadre sportif, un formateur, un client, un représentant du personnel, comme par un supérieur hiérarchique. Il n’y a pas nécessité de lien hiérarchique entre l’auteur des faits et la victime.
  • La qualification de harcèlement sexuel n’est plus nécessairement liée à la recherche d’un acte de nature sexuelle.
  • Des comportements communément qualifiés de harcèlement sexuel, peuvent être constitutifs d’une agression sexuelle.

La victime doit déposer plainte dans un délai maximal de 3 ans. La juridiction compétente est le tribunal correctionnel.

Le harcèlement sexuel est un délit, passible de sanctions pénales :

  • deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.
  • Des circonstances aggravantes (notamment en cas d’abus d’autorité ou de faiblesse) portent les peines encourues à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
  • L’auteur de harcèlement sexuel peut devoir verser à sa victime des dommages-intérêts, en réparation du préjudice causé

Indépendamment de la procédure pénale, dans l’entreprise, des mesures disciplinaires allant jusqu’au licenciement peuvent sanctionner le harcèlement sexuel, lequel est défini à l’article L1153-1 du Code du Travail pour le secteur privé, et à l’article 6 ter de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

La juridiction à saisir, afin de faire cesser ces agissements et obtenir réparation est :

  • le conseil des prud’hommes si la victime est salariée du secteur privé
  • le tribunal administratif si la victime est agente du public.

Régime de la preuve, dans le domaine du harcèlement, sexuel ou moral :

Eu égard au rapport de subordination qui déséquilibre la relation employeur/salarié-e, le régime de la preuve a été aménagé en matière de harcèlement.

La victime doit présenter des faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement,qu’il soit sexuel ou moral :

  • Relevé des faits précis, datés, mots et gestes… dans quelles circonstances et devant qui… Il est important de tout noter au fur et à mesure, afin de constituer une mémoire objective.
  • Méls, post-it, documents annotés… comportant des propos déplacés.
  • Documents montrant une différence de traitement, une baisse des responsabilités
  • Certificats médicaux et témoignages. Attention: ni un état de santé dégradé, ni des témoignages de proches ne suffisent toujours à prouver les faits allégués par la victime.

Il appartient ensuite à la personne accusée de démontrer que ces faits ne sont pas constitutifs d’un harcèlement sexuel.

Néanmoins, l’établissement de la preuve continue de constituer un sérieux obstacle.

Et il faut savoir que si une victime ou un témoin de harcèlement bénéficie d’une protection contre d’éventuelles sanctions (voir ci-dessous), une dénonciation mensongère de mauvaise foi fait encourir un licenciement pour faute grave (Cass. soc. 6 juin 2012, n° 10-28345).

Toutefois, la mauvaise foi n’est pas caractérisée” du seul fait que le harcèlement dénoncé n’est pas établi (Cass. soc. 10 mars 2009, n° 07-44092, BC V n° 66 et cassation sociale le 13 février 2013). En effet on ne peut demander à une victime ou un témoin d’être juge de l’exacte qualification juridique des faits qu’il subit ou qu’il constate. En matière de harcèlement moral, la Cour de Cassation a ainsi récemment ordonné la réintégration d’une salariée en rappelant que “le licenciement d’un salarié motivé par la dénonciation par ce dernier de faits de harcèlement moral constitue un trouble manifestement illicite, sauf mauvaise foi du salarié, qui doit être démontrée par l’employeur et ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce” (25/11/2015, n°14-17551)

En outre, le régime d’aménagement de la charge de la preuve accordé aux victimes ne bénéficie pas à l’employeur contre le salarié accusé de harcèlement, moral en l’occurrence (Cass. soc., 7 févr. 2012, société Terreal).

NB: Dans une entreprise, toute organisation syndicale représentative peut, avec l’accord écrit de la personne harcelée, engager à sa place une action en justice.

Les administrations et les employeurs publics sont tenus d’assurer la protection de leurs agents victimes d’agression dans le cadre de leurs fonctions, de leurs mandats ou lors de condamnations civiles ou pénales dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne leur est pas imputable (article 11 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983), complété par un arrêt du Conseil d’Etat du 12 mars 2010 qui introduit le harcèlement moral dans le périmètre de cette protection fonctionnelle.

La loi du 6 août 2012 pose aussi, à travers les différents textes de référence, le principe de sanction des discriminations à l’encontre de victimes ou témoins de harcèlement sexuel. Ces discriminations pouvant prendre la forme, de refus de fourniture d’un bien ou d’un service (location d’un logement, entrée dans un lieu public…), comme de refus d’embauche ou de titularisation, ou encore de sanction ou licenciement d’un-e salarié-e… Nul-le ne peut être sanctionné-e pour avoir dénoncé des faits de harcèlement sexuel ou pour lutter contre. Ces protections sont étendues aux stagiaires et personnes en formation.

Les textes du Code Pénal relatifs au harcèlement sexuel et moral doivent désormais obligatoirement être affichés sur les lieux de travail et également, pour ce qui concerne le harcèlement sexuel, dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche (C. trav., art. L. 1152-4 et L. 1153-5).

Le droit d’alerte des délégués du personnel est étendu au harcèlement sexuel et moral (C. trav., art. L. 2313-2).

Le harcèlement sexuel est désormais inscrit, aux côtés du harcèlement moral, dans la liste des domaines dans lesquels l’employeur est tenu à une obligation de prévention des risques professionnels (C. trav., art. L. 4121-2). Ainsi, dans le cadre de sa démarche d’évaluation et de prévention des risques, l’employeur doit prendre toute mesure de diffusion, présentation, sensibilisation, formation visant à améliorer la connaissance, la prévention et l’identification des phénomènes de harcèlement.

– Arrêt N°13-18603 de la Cour de Cassation du 11 mars 2015 indiquant que l’employeur est tenu d’une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité. Ainsi, un employeur manque à cette obligation lorsqu’un-e salarié-e est victime sur le lieu de travail d’agissements de harcèlement moral ou sexuel exercés par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures pour faire cesser ces agissements (voir également Cassation N°10-20935 du 19 janvier 2012)

La mission de conseil attribuée par le code du travail au médecin du travail et à destination des employeurs, des salariés et de leurs représentants, est élargie à la prévention du harcèlement sexuel et moral (C. trav., art. L. 4622-2).

L’inspecteur du travail est désormais compétent pour constater les infractions en la matière dans le cadre des relations de travail (C. trav., art. L. 8112-2).

A noter : la LOI n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes complète l’article 1153-5 du Code du Travail en renforçant la responsabilité de l’employeur: “L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner”.

Par ailleurs, cette même loi précise et renforce, dans le Code pénal, les articles ayant trait au harcèlement moral (Section 3 bis).

Si le harcèlement sexuel est spécifiquement lié au genre, il s’appuie sur le harcèlement moral, et cette composante ne doit pas être écartée de la réflexion/action.

On notera que l’article 222-33-2-1 vise les faits de harcèlement dans le couple.

Article 222-33-2 :Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende“.

Article 222-33-2-1 :Le fait de harceler son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours. Les mêmes peines sont encourues lorsque cette infraction est commise par un ancien conjoint ou un ancien concubin de la victime, ou un ancien partenaire lié à cette dernière par un pacte civil de solidarité”.

Dans cette même section est créée un nouveau délit général de harcèlement (Article 222-33-2-2 du code pénal), qui stipule que : “Le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail.”. La peine pouvant être doublée, voire triplée, dans un certain nombre de cas“.

Enfin, suite à la fois à l’action de la Cgt et à un rapport du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (mars 2015), qui constatait que 80 % des femmes salariées se disent régulièrement confrontées à des attitudes ou décisions sexistes et que 93 % estiment que ces attitudes peuvent amoindrir leur sentiment d’efficacité, cette notion a été codifiée dans le Code du travail, à l’article L. 1142-2-1 :

« Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant » (sources : Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, et Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes: Rapport “Le sexisme dans le monde du travail entre déni et réalité”, mars 2015, enquête menée en 2013 auprès de 15 000 salariées de 9 grandes entreprises).