Le Coquelicot d’Axway – Décembre 2022

Complémentaire santé : tout est une question d’équilibres

Comme tous les ans, le CSE est informé des comptes de la complémentaire santé auquel nous contribuons toutes et tous. Deux documents ont été présentés : la situation des comptes 2021 et celle au premier semestre 2022. Si les documents sont fouillés, leur lecture est extrêmement éducative.

Sur l’année 2021, le nombre d’assurés toutes catégories (salarié, enfant, conjoint) est en baisse. Si l’année 2021 se caractérise par un déficit marqué, il reste à l’équilibre sur 3 ans. Pour les salariés et leurs enfants les cotisations sont en baisse, suivant en cela celle des effectifs mais la cotisation moyenne par salarié est aussi en baisse alors que le salaire moyen était en augmentation. C’est sans doute l’effet du plafonnement des cotisations qui -proportionnellement- affecte plus les bas salaires que les hauts.
Les prestations consommées par les salariés et leurs enfants connaissent -elles- une hausse importante.

Concernant les conjoints, si le nombre de conjoints assurés baisse, les cotisations augmentent (autant en valeur absolue que par conjoint), les prestations sont en forte hausse. C’est à notre sens un effet de la séparation des conjoints qui exclue ceux en bonne santé et attire ceux ayant des besoins en santé réels.

Les trois plus gros postes de dépense sont le dentaire, l’optique et les « autres soins » (dont des soins post-hospitalisation). Ce sont également les postes ayant le plus augmenté depuis 2019.
Concernant l’optique, les chiffres indiquent que pour ceux d’entre vous ayant acheté leur équipement chez un opticien du réseau Itélis, vos lentilles, montures et verres sont mieux remboursés. Nous ne pouvons que vous encourager à consulter la liste des opticiens affiliés sur le site de la CGRM. L’achat via le réseau Itelis permet également de bénéficier de garanties spécifiques.

NAO : priorité aux salaires

Les Négociations annuelles sur les salaires ont débuté le 1er décembre. Le premier volet de celles-ci porte « sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise ». Dans ce chapitre, nous avons ouvert les négociations sur les salaires et notamment les rattrapages liés à l’inflation. Nos revendications portent sur 3 axes :

Le rattrapage de l’inflation

Nos propositions s’appuient sur les résultats de l’enquête auquel vous avez été nombreux à participer (presque 120 personnes au moment où nous écrivons ces lignes). Nous publierons le détail des réponses sitôt le sondage terminé le mercredi 14 décembre à 12h. Les premiers résultats nous permettent de défendre une part de collectif dans les prochaines augmentations. N’hésitez pas à vous abonner à notre espace Jive CGT ou nous posterons le compte-rendu des réunions comme nous l’avons déjà fait.

Négocier l’enveloppe globale dédiée aux augmentations en 2023

Les deux premiers sujets sont liés. Nous avons demandé à connaitre et négocier l’enveloppe globale avant de savoir quelle part sera dédiée aux augmentations collectives.

Le bilan de l’engagement de la direction, pris lors de NAO 2021 de revaloriser la situation des non-cadres

Pour rappel, vos élu.e.s CGT et de l’intersyndicale ont obtenu l’engagement suivant : « L’Entreprise s’engage à revaloriser la position des salariés occupant un emploi associé à une classification inférieure à TP2, lors du prochain cycle de révision salariale de l’année 2022 et ce, sans impact négatif pour les salariés concernés sur le plan des éventuelles charges sur salaire supplémentaires, générées à l’occasion de cette opération (maintien du net à payer avant PAS). » Nous continuerons à vous informer de l’avancée de ces négociations et à porter vos revendications.

Brèves

Abandon du projet de fermeture du 25ème étage de la Tour W

Dans la continuité de ce que nous écrivions dans le Coquelicot de novembre, le projet local de « fermeture » du 25ème de la Tour W est abandonné, au profit d’une réflexion globale sur l’utilisation et la gestion des locaux sur l’ensemble des sites Axway. À l’origine de cette « désaffection » d’une grande partie des salariés pour les bureaux, la mise en oeuvre du télétravail chez Axway qui permet à toutes et tous d’avoir un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, d’économiser sur les temps de transport souvent important et donc sur la santé, une réduction de l’absentéisme (plusieurs études récentes en témoignent), un gain en autonomie et responsabilité, une organisation de son travail davantage efficiente.
Pour autant, Axway s’achemine-t-elle vers le zéro bureau ? Nous ne le pensons pas et ce n’est pas souhaitable, ne serait-ce qu’en terme de lien social que l’entreprise doit (et souhaite ?) conserver.
Alors, quelles solutions ? Du flex office ? De la sous-location minimale de quelques espaces dans les locaux de la grande sœur Sopra Steria à la Défense ?
Pas de réponse pour l’instant de la part de la direction, sachant que le bail de la Tour W court jusqu’en mars 2024.

Le CSE émet un avis réservé sur la politique sociale d’Axway pour l’année 2021

Nous publions de larges extraits de l’avis, voté à l’unanimité par les élu.e.s du CSE lors de la réunion du 29 novembre. L’intégralité de cet avis est à consulter dans le PV CSE de novembre, prochainement publié sur l’espace ENSEMBLE et sur le site du CSE.

L’évolution des rémunérations

Le salaire annuel moyen atteint 70 349€, en hausse de 2,6% par rapport à 2020. La médiane progresse de 2,3%, pour atteindre 64 575€. Contrairement à l’année 2020, où les profils embauchés avaient été davantage juniors, et donc présentaient des niveaux de salaires inférieurs aux sortants et aux restants, l’année 2021 montre un niveau de salaire moyen des entrants (76 054€) supérieurs aux restants et aux sortants (respectivement 71 425€ et 61 792€). Par exemple les nouveaux entrants « Account Executive III » perçoivent en moyenne 13 302€ de plus que les restants, et les « Sales Development Rep » 3 050€ de plus.
La moyenne de la part variable atteint 20 819€, en baisse de 24,3% (-6 666€), mais par contre une médiane en hausse (+9,2%, soit +783€), à 9 298€. Le nombre de bénéficiaires est en légère baisse en 2021 (-5), avec 208 bénéficiaires. Le montant maximum par bénéficiaire de l’intéressement atteint 1 706€ en 2021, en baisse de 5,3%.
En 2021, le taux de revalorisation moyen est de 2,9%, contre 3,4% en 2020, 4,1% en 2019, 4,7% en 2018 et 2,9% en 2017. En parallèle, le taux d’inflation communiqué par l’INSEE atteint 1,6% en 2021, contre 0,5% en 2020, 1,1% en 2019, 1,8% en 2018 et 1% en 2017. Notons ainsi que la différence entre la revalorisation moyenne et l’inflation est relativement faible en 2O21, à 1,3 %, contre 2,9% en 2020 ou 3% en 2019.
Le pourcentage de salariés non revalorisé est en hausse, à 23% en 2021, contre 19% en 2020 (93 salariés concernés, contre 73 en 2020). Les salariés promus dans une classification supérieure ont bénéficié d’une revalorisation moyenne de 6,3% (37 salariés dans l’échantillon), contre 2,6% pour les salariés non promus (369 salariés).
Contrairement aux années précédentes, les revalorisations moyennes sont bien plus uniformes par tranche de salaire, mais il subsiste un décalage pour la tranche inférieure, moins revalorisée que les autres tranches de salaire, à 1,5%, alors que les autres tranches dépassent les 2,5%. Sur cette tranche de salaire, 12 salariés sur 35 n’ayant pas été revalorisés en 2021, ce qui pose la question de la volonté de rétention de ces salariés par la Direction.

A effectif constant entre 2011 et 2021, soit 169 salariés concernés

Sur les 169 salariés, 10 ont perçu une revalorisation globale sur la période inférieure à l’inflation (soit 6% de l’effectif permanent), seulement 105 ont évolué sur la période 2011-2021 sur une classification supérieure, soit 62,1% de l’effectif.
En 2021, l’effectif permanent dispose d’une revalorisation moyenne de 3,9% en 2020, contre 3,5% en 2020, soit un niveau légèrement plus élevé que pour le reste de l’effectif sur ces 2 années. Notons également que 21% de l’effectif permanent a été revalorisé tous les ans sur la période 2011-2021.

L’égalité professionnelle

Le taux de féminisation atteint 32% en 2021, contre 30% en 2020, et 29% en 2019, et nous notons notamment une hausse du taux de féminisation qui concerne surtout les classifications I2.1 à I2.3, puis la classification I3.2.
Le nombre de métiers où le salaire des femmes peut être comparé à celui des hommes reste très limité, mais nous constatons un écart de 15,5% à la faveur des hommes pour les Senior Services Consultant III, et au contraire un écart de 4,8% à la faveur des femmes pour les Sales Development Rep.
Les femmes bénéficient, pour la 2ème année consécutive, d’une revalorisation moyenne supérieure à celle des hommes (3,3% vs 2,7%).
La progression de l’Index d’Egalité Femmes / Hommes d’Axway entre 2020 et 2021 permet à la société d’être en ligne avec ses principaux concurrents, à 88 sur 100, grâce à la présence de 2 femmes parmi les 10 plus hautes rémunérations de l’exercice.

La formation

Le montant consacré à la formation est en forte baisse en 2021 (-20,7%), à 750K€. Le nombre d’heures de formation, hors formations obligatoires, est en hausse en 2021 (+753 heures), pour atteindre 7 027 heures. Le nombre moyen d’heures par stagiaire est en repli, avec en moyenne des cessions de formation durant 1 heure, contre 2,8 heures en 2020, sous l’effet d’un mode de formation quasiment uniquement en e-learning et à distance.
Notons qu’il y a 1 096 heures de formation obligatoire, ce qui donne au total 8 123 heures de formation en 2021. Rapporté à l’effectif moyen, cela représente 16,8 heures par salarié et 14,5 heures hors formation obligatoire (contre 13 heures en 2020).
La hausse des heures de formation concerne notamment les Sales (+524 heures), suivis par les formations Product / R&D (+352 heures) et par les formations CSO (+237 heures). En revanche, les heures de formation Structure sont en baisse (-360 heures).

Comme les années antérieures, aucun plan de formation n’a été établi pour 2021, ce qui ne permet pas aux élus de suivre l’évolution de celui-ci, ni d’apprécier les réalisations effectuées au cours de l’année.
Il n’y a pas non plus de plan de formation pour 2022, mais un bilan à mi-année montre qu’il y a eu 2 355 heures de formation (hors formations obligatoires), soit 35% du réalisé annuel 2021.

Les aspects environnementaux

Le principal objectif du Groupe Axway à horizon 2028 est la neutralité carbone. Grâce notamment à la généralisation du télétravail, le Groupe a réduit sa consommation d’énergie de 30% entre 2020 et 2021. En France, les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 28% entre 2020 et 2021, un repli qui reste néanmoins mesuré par rapport aux Etats-Unis et à l’Allemagne.
Il n’y a pas de document spécifique à Axway SA sur ce sujet, la mise en place de reporting et de missions spécifiques au sein du Groupe sur ces aspects étant très récents. Cela ne permet pas aux élus d’émettre un avis sur la politique menée par l’entreprise sur ces aspects.

Aux vues des différents sujets, le CSE émet les avis suivants :

  • Baisse de l’effectif : l’effectif est en baisse continue depuis plusieurs années et ne peut plus être attribuée à des facteurs conjoncturels. Cette baisse correspond donc à une volonté de la direction de réduire les coûts. Les élus s’inquiètent de la répercussion de cette baisse continue sur la qualité des conditions de travail et notamment sur les risques psycho-sociaux.
  • Évolution des rémunérations : les élus déplorent que les tranches de rémunérations les plus faibles soient les moins augmentées. Les élus demandent qu’un effort soit fait dans ce sens d’autant plus qu’en valeur absolue augmenter ces tranches représente un montant beaucoup plus faible.
  • Égalité professionnelle : les élus saluent la prise de conscience et les efforts de la direction sur ce point.
  • Formation : le CSE souligne la problématique de temps libéré et consacré aux formations en ligne. En effet, à la différence des formations « en présentiel », il est souvent difficile pour le salarié de bénéficier d’un temps à consacrer aux différentes formations. Par ailleurs, le CSE souligne le besoin d’avancer sur les discussions sur la GPEC pour que de véritables investissements et plans de formation soient établis et qu’ils permettent une meilleure adéquation des qualifications et compétences aux besoins de l’entreprise pour le plus grand bénéfice des clients, de l’entreprise et des salariés. Dans un environnement de transformations digitales, d’évolution rapide des technologies, des méthodes de développement et de déploiement, des modèles d’affaires, des contraintes de sécurité et réglementaires, les salariés doivent être mieux accompagnés pour acquérir les compétences nécessaires à l’accomplissement de leurs missions.
    Enfin, la commission formation a proposé à la Direction une refonte des documents de référence permettant de rationaliser le plan de formation et le bilan. Ce travail est pour l’instant resté lettre morte. Le CSE le déplore et souhaite que la Direction mette en place les moyens nécessaires à la cohérence et l’efficacité des actions de formation
    .
  • Aspects environnementaux : le CSE prend note des travaux effectués par l’entreprise dans le cadre du RSE mais souhaite qu’au-delà de la volonté d’affichage, des dispositifs concrets soient mis en œuvre tant du point de vue d’éducation des salariés et du management aux enjeux de la transition énergétique et du changement climatique que d’un point de vue purement opérationnel avec des dispositifs plus efficaces pour récupérer les plastiques, la gestion des fournisseurs ou la gestion des déplacements par exemple.

L’actu juridique

Quelle étendue pour le devoir de loyauté de l’ancien salarié ?

La relation entre un salarié et son employeur emporte de nombreuses obligations entre les deux parties, au nombre desquelles se trouve un devoir de loyauté. Cette obligation contient plusieurs charges pour l’employé, notamment une obligation de confidentialité ou une obligation de non concurrence.

Le salarié est tenu par un devoir de loyauté envers son employeur

Le droit commun prévoit que, de manière générale, les contrats sont exécutés de bonne foi (article 1134 du Code civil). Ce principe trouve son corollaire à l’art. L.1222-1 du Code du travail.
Il a été déduit de ce principe d’exécution de bonne foi un devoir de loyauté du salarié envers son employeur, au terme duquel il ne doit pas lui nuire de quelque façon que ce soit. Ce devoir existe même sans stipulation expresse dans le contrat de travail.

Qu’implique le devoir de loyauté du salarié envers l’employeur ?

Le contenu de cette obligation de fidélité reste assez souple et crée, entre autres, une obligation de non concurrence à la charge de l’employé. La seule qualité de salarié implique donc que, durant la durée du contrat de travail, le salarié ne peut pas exercer une autre activité concurrente pour son compte ou pour le compte d’un tiers au détriment de son employeur.

En principe, le devoir de loyauté disparaît à l’expiration du contrat de travail. Le salarié est alors libre d’entreprendre une nouvelle activité professionnelle dès lors qu’il n’exerce pas des « actes de concurrence effectifs » : il peut donc organiser son départ vers une entreprise concurrente ou créer une entreprise concurrente – dès lors que l’activité de cette nouvelle entreprise ne commence pas avant la fin de son préavis. La jurisprudence est généralement favorable à la liberté du salarié d’entreprendre une nouvelle activité professionnelle.

L’étendue exceptionnelle de l’obligation de loyauté du salarié

Néanmoins, l’obligation de loyauté peut voir ses effets prolongés. Le devoir de loyauté peut ainsi être amplifié par l’établissement d’une clause de non concurrence au sein du contrat de travail ou dans une convention collective. Celle-ci devra remplir certains critères :

  • elle doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ;
  • elle doit être limitée dans le temps ;
  • elle doit être limitée dans l’espace ;
  • elle doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
  • elle doit faire l’objet d’une contrepartie financière.

Cette clause pourra prévoir plus en détail des limitations quant à la reprise d’activité du salarié après la rupture du contrat de travail. Le recours à ce dispositif reste néanmoins facultatif.

Le devoir de loyauté ne dépend pas toujours d’une clause de non concurrence

Bien que la clause de non concurrence précise l’étendue de l’obligation de loyauté, l’absence d’une telle stipulation n’empêche pas les juridictions de condamner les pratiques d’anciens salariés qui commettraient des actes de concurrence déloyale.

Par exemple, la chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée récemment le 1er juin 2022 (pourvoi n°21-11.921) pour retenir que, même sans clause de non concurrence :

  • La conservation d’informations confidentielles par un ancien salarié et leur appropriation par la société qu’il crée constitue un acte de concurrence déloyale;
  • La société qui recrute un salarié tout en connaissant l’existence d’une obligation de non concurrence de celui-ci avec son ancien employeur commet une faute délictuelle, peu importe le degré de concurrence en cause. L’ancien employeur peut agir sur le fondement de l’article 1240 du Code civil pour demander une indemnisation.

Prudence donc aussi bien du côté des salariés entamant une nouvelle aventure que pour les entreprises en quête de nouveaux talents.

Recrutement : la novlangue managériale en bonne place dans les offres d’emploi

Ne dites pas “vendeur” mais “client advisor“, pas “chargé de recrutement” mais “talent acquisition specialist” : sur les sites d’emploi, les intitulés de poste abscons usant de jargon anglophone fleurissent, considéré comme un gage de modernité mais au risque de “flouter” la réalité.
Qu’il s’agisse de Pôle emploi, Indeed ou encore Linkedin, il suffit d’un rapide coup d’oeil pour tomber sur des propositions comme “Inside sales representative” (commercial), “consultant social listening” (veille réseaux sociaux), ou encore “customer success manager” (relation clients). Parfois, le descriptif du poste permet d’y voir plus clair, mais dans certains cas, cela reste tout aussi obscur pour le commun des mortels. Le “chief people officer” que recherche un cabinet de recrutement devra par exemple “driver la transformation groupe au service de la croissance en incarnant le renouveau“. Un “scrum master” devra “faire vivre les valeurs de l’agilité” d’un groupe de conseil…
Eric Gras, expert du recrutement chez Indeed France, constate que la tendance s’est “clairement” accélérée ces dernières années. Dans certains cas, mondialisation oblige, l’anglicisme est devenu la norme, mais dans d’autres, des postes “pas super sexy” sont ripolinés, ce qui n’augmente pas le nombre de candidatures ciblées, donc “n’est au bénéfice de personne“, explique-t-il. De fait, derrière une offre d'”Office & Happiness Manager“, le descriptif du poste montre que le salarié sera chargé du standard et de l’accueil… Un poste de “Building & property officer” masque un job de gardien de résidence universitaire.
Comme Pôle emploi, qui prône des intitulés “clairs et précis” ,Indeed recommande à ses clients de parler français. “Mais la recommandation majeure est de parler le langage du candidat“, note Eric Gras. Or, pour certains métiers comme “office manager” qui gèrent la vie du bureau, c’est précisément cette appellation que les salariés utilisent dans leur recherche.

Presque risible

Pour Jean-François Amadieu, professeur de gestion en ressources humaines à Paris 1, “ce vocabulaire utilisé systématiquement dans le management est fait pour faire moderne“. “Dès que vous le dites en anglais, c’est plus ronflant“, mais “c’est souvent incompréhensible, presque risible“. La sémiologue Mariette Darrigrand note en outre que c’est souvent du “globish“, du très mauvais anglais, de la “novlangue“. Outre l’idée de modernité, “il y aussi une volonté de séduction parce que c’est très dur de recruter aujourd’hui. Dire client advisor plutôt que vendeur en est l’exemple parfait. C’est la même idée que technicien de surface pour femme de ménage, mais on est passé au globish“.
Malgré tout, ces termes abscons peuvent aussi correspondre à “une nouvelle fonction qui n’existait pas auparavant” comme le “chief impact officer“, chargé d’évaluer l’incidence de l’activité de l’entreprise en terme d’écologie, note M. Amadieu. Dans un contexte de tensions sur le marché du travail, le sujet est moins anecdotique qu’il y paraît. “Le paradoxe est qu’aujourd’hui, on a 50 % d’offres d’emploi en plus qu’avant le Covid” et qu’il y a des difficultés de recrutement, donc “je dis aux recruteurs : quelqu’un qui ne comprend pas le titre ne clique même pas sur l’offre“, souligne Eric Gras. “Si ces employeurs veulent attirer des candidats différents”, les titres obscurs “ce n’est pas très inclusif“, prévient aussi M. Amadieu, tout en regrettant le fait que “beaucoup n’ont pas le souci d’attirer des seniors” en reconversion.
En outre, pour Sophie Binet secrétaire générale de la CGT cadres (Ugict), cela “pose problème” car cela “floute le contenu réel du poste, la classification à laquelle cela se rapporte“, avec le risque d’aboutir à “des gens qui peuvent être bons à tout faire parce qu’on ne sait pas ce sur quoi ils sont recrutés. “Ca fait rêver, ça emporte au loin“, mais c’est “une sorte “d’écran de fumée“, renchérit la sociologue du travail Danièle Linhart. Pour Mariette Darrigrand, ces titres ronflants sont aussi “en miroir des grandes écoles“: elles diffusent un vocabulaire “pour attirer les parents parce que si on leur dit que leur gamin dans trois ans va avoir une licence de vente, ça ne fait pas signer le chèque!“. En attendant, pour ceux qui trouveraient leur titre un peu fade, il existe des générateurs comme siliconvalleyjobtitlegenerator.tumblr.com ou bullshitjob.com/title.
Source : AFP cité par Liaisons sociales, septembre 2022.

Le Coquelicot d’Axway – Décembre 2022